Trente ans après la fin de la première guerre d'Indochine, paraît aux éditions Lavauzelle, sous le titre «Une guerre sans fin, 1945-1954», une rétrospective iconographique et historique sur les huit longues années de combats menés par le Corps Expéditionnaire Français en Extrême-Orient.

Dans sa forme, cet ouvrage se compose d'une importante sélection photographique, souvent inédite, extraite des archives de l'Etablissement Cinématographique et Photographique des Armées, par Pierre Ferrari, reporter-photographe de talent. Auteur de très nombreux reportages, Pierre Ferrari a acquis une grande renommée par son expérience personnelle des théâtres d'opérations extérieurs où a combattu l'Armée Française : Indochine, Tunisie, Algérie, Egypte. Ces nombreux documents sont présentés chronologiquement en de courts chapitres. Ils sont accompagnés d'un texte de présentation et de légendes détaillées dues à Jacques M. Vernet, officier d'active, docteur en histoire dont les recherches sont orientées principalement sur la zone Pacifique - Extrême-Orient. Cependant, l'image prédomine le texte grâce au talent de mise en page de Laurence Verret, maquettiste d'une grande sensibilité.

Des cartes et des tableaux récapitulatifs complètent certains chapitres, l'ensemble étant précédé d'un résumé des huit années d'opérations, d'où se détachent la période de la guerre coloniale et celle de la guerre entre nations opposées idéologiquement. L'année 1953-1954 est traitée avec plus d'acuité car c'est elle qui a vu la conclusion dramatique de cette guerre.

Dans son fonds, «Une guerre sans fin, 1945-1954» fait revivre par l'image et le texte, l'atmosphère du combat quotidien mené par le soldat dans la rizière ou la jungle, contre un Vietminh omniprésent mais invisible, souvent vaincu mais jamais abattu, dans un environnement physique et moral éprouvant. Au niveau de la conduite des opérations, cet ouvrage rappelle les hésitations, les incertitudes et le désarroi des gouvernements français face à une guerre incomprise par la métropole. Sur une telle toile de fond, les responsables militaires sur place ne disposent que de moyens mesurés, si ce n'est réduits, contre son adversaire qui se renforce sans cesse et pour lequel la vie, le temps, et l'espace n'ont pas la même valeur que dans la civilisation occidentale. Servies par un commandement unique et identique tout au long de cette guerre, la patience et la pugnacité du Vietminh ont triomphé d'une stratégie incertaine, appliquée par un pouvoir civil lointain et un commandement militaire contraint peu à peu à subir les règles de son adversaire. L'héroïsme et la ténacité des combattants venus de tous les horizons de l'Union Française, se sont manifestés sans défaillance, autant dans la résistance désespérée d'un petit poste submergé dans la nuit que dans l'abnégation des volontaires se jetant du ciel dans l'enfer de l'ultime grande bataille.

Préfacé par M. Jean-Pierre Dannaud, Conseiller d'Etat et Directeur des Services Français d'information en Indochine de 1950 à 1954, à qui l'on doit les excellentes «Indochine profonde» et «Guerre Morte» publiées en leur temps, «Une guerre sans fin, 1945-1954» est en quelque sorte le dernier volet de ce tryptique indochinois, dédié, au-delà des choix politiques et des événements militaires, à tous les combattants de toutes armes et de toutes races qui se sont battus et qui sont morts pour une certaine idée de la parole donnée, de l'honneur et de la France.