L'étude en profondeur des structures, des fonctions et des techniques, en particulier de la stéréotomie, aux siècles dits classiques, permet de faire renaître certaines évidences, comme l'existence d'une manière française, éclipsée trop longtemps par le goût du gothique, mis en avant en particulier par Viollet-Le-Duc. ©Electre 2024

L'Architecture à la Française, publiée pour la première fois en 1982, rééditée aujourd'hui avec de nouveaux développements qui en confortent les conclusions, est une description de la manière française de construire, s'appliquant particulièrement - mais pas exclusivement - à la période des Temps modernes. Le traitement que les historiens d'art appliquaient à cette période, réduite aux effets de la dialectique du baroque et du classicisme, masquait la présence de phénomènes de longue durée et conduisait à une sorte de désocialisation et dématérialisation de l'art de construire : rapports entre maîtres d'œuvre et ouvriers, modes de transmission du savoir, localisation des pratiques, incidence des techniques et de leur progrès, des fonctionnements et de leur affinage sur les choix esthétiques, sont constitutifs d'une histoire de l'architecture.

La démonstration ne s'appuie pas sur le présupposé de génies nationaux, mais sur la confrontation des manières locales, et sur le témoignage des contemporains, hautement conscients de la diversité des pratiques d'un pays à l'autre (pays lato sensu : Etats, provinces, entités géographiques). La distinction traditionnelle entre architecture savante et architecture populaire en ressort atténuée.

Un tiers du livre est consacré à la stéréotomie, qui touche aux sciences comme aux techniques et aux matériaux (géométrie, perspective, taille de la pierre) et apparaît comme une spécificité française d'origine médiévale.

Dans ce système d'explication, le classicisme n'est pas un style, mais une idéologie, portée par le développement de la production des traités, tendant à faire prévaloir l'idéal d'une architecture universelle, mais constamment récupérée par les manières dominantes en quête de consécration comme modèle pour l'architecture européenne.