L'Atlas des abysses est né de la volonté de Stéphanie Braban, grande reporter pour Thalassa, de mettre en lumière les enjeux cruciaux qui se jouent dans les grandes profondeurs marines. S'associant à Jozée Sarrazin, chercheure en écologie benthique spécialisée dans l'étude des animaux des abysses, et à l'illustratrice Julie Terrazzoni, elles ont créé un ouvrage qui invite à l'exploration d'un monde méconnu.

L'objectif principal de cet atlas est de déconstruire l'idée que les grands fonds marins sont des déserts. Au contraire, il révèle une diversité de paysages sous-marins — canyons, chaînes de montagnes, plaines, fosses — chacun abritant des écosystèmes uniques et fascinants. Pour chaque écosystème, trois à quatre espèces emblématiques ont été sélectionnées, non seulement pour leur attrait visuel, mais aussi pour les anecdotes et les découvertes scientifiques qui les entourent. Le processus de recherche fut rigoureux, impliquant la consultation de bases de données spécialisées, d'articles scientifiques et de l'actualité pour garantir l'exactitude des informations et la richesse des récits.

L'exploration visuelle des abysses est infime : à peine 0,001% des fonds océaniques ont été explorés visuellement, alors même qu'on estime qu'il reste entre 1 et 10 millions d'espèces à découvrir. Pourtant, ces écosystèmes sont de plus en plus menacés par les activités humaines. La pollution, qu'elle soit plastique ou chimique, atteint les profondeurs les plus extrêmes, comme la Fosse des Mariannes. La pêche s'aventure toujours plus profond, et l'extraction de pétrole et de gaz repousse les limites des forages. La menace la plus pressante est sans doute l'exploitation minière des ressources minérales présentes dans certains écosystèmes abyssaux, comme les nodules polymétalliques, riches en cobalt, zinc ou cuivre. Ces ressources sont très demandées pour la transition énergétique, mais leur extraction pourrait avoir des conséquences dévastatrices sur une biodiversité encore largement inconnue.

L'Atlas des abysses n'est pas seulement un livre d'une grande beauté visuelle grâce aux illustrations remarquables de Julie Terrazzoni, dont le réalisme poétique est souvent confondu avec des photographies. C'est aussi un plaidoyer pour la protection de ces environnements inaccessibles. En montrant la splendeur et la richesse de ces mondes lointains, l'ouvrage vise à susciter l'émerveillement et, par extension, le désir de protéger. Il souligne l'urgence de mieux connaître ces écosystèmes avant qu'ils ne soient irréversiblement altérés par l'activité humaine.