Au commencement était le code
Au
mitan de la dernière décennie du siècle passé (en 1995, quoi) il devint de bon
ton de créer un site web personnel et d'en donner l'adresse aux quelques
privilégiés de ses amis qui possédaient alors un accès Internet. Quelques
notions hésitantes de HTML, langage dans lequel étaient – et sont toujours –
bâties les pages web, permettaient à l'internaute de partager avec le monde
entier sa passion pour les photographies floues d'animaux domestiques (une
recherche « chats » dans la rubrique images de Google vous dira combien ce goût
des photos de bestioles est universel), les principaux évènements de l'histoire
familiale (naissances, communions, mariages et vacances aux îles) ainsi que les
hobbies, plus ou moins coupables, des joyeux programmeurs.
Le monde se
partageait alors entre ceux qui savaient - faire un site web- et ceux qui ne
savaient pas.
Puis vint le logiciel
A
mesure que les technologies du web se raffinaient et se complexifiaient, au point
qu'il est aujourd'hui impossible de fabriquer un site professionnel sans avoir
recours à des gens si spécialisés qu'ils peinent parfois à se comprendre eux-mêmes, on
a heureusement vu se développer des outils permettant un emploi facile
des techniques de publication en ligne les plus élémentaires. Ainsi sont apparus
les éditeurs html, sortes de traitements de texte du web qui permettaient à tout
un chacun de construire son propre site sans trop de difficultés. Ces
logiciels, d'emploi aisé certes, demandaient toutefois un apprentissage attentif,
hésitant parfois, qui en a découragé plus d'un. En outre, les sites web, une fois mis
en ligne, demandaient à être constamment entretenus et approvisionnés en
informations fraîches. Un travail tel que, souvent, ils furent laissés à
l'abandon et errent dans les limbes de la websphère, toujours là mais seuls,
abandonnés...
Enfin le Blog fut
Parallèlement
au développement des sites personnels, quelques informaticiens ou spécialistes
des nouvelles technologies, commencèrent à publier de simples lettres
d'information en ligne. Ces dernières, souvent très spécialisées – elles
concernaient essentiellement le monde informatique et l'Internet, se
présentaient de la façon la plus simple qui soit : peu ou pas d'images, de mise
en page, encore moins d'effets spéciaux : du contenu brut. Cette simplicité
technique alliée à une grande réactivité à l'information de la part des auteurs
fit rapidement le succès de la formule qui se développa dans le monde des
nouvelles technologies tout d'abord puis, l'usage du web se démocratisant, dans
celui de l'économie, de l'industrie et de l'information généraliste. Vers 1996,
apparurent les premiers journaux en ligne, c'est à ce moment que Jorn Barger, un
des pionniers d'Internet crée le néologisme Weblog pour désigner ces journaux en
ligne. En 1999 apparaissent les premiers outils de gestion de weblogs qui
permettent l'administration en ligne de son blog par l'internaute. Dès le début,
le principe est simple : on ouvre, on tape son texte, on clique, c'est en
ligne.
Le succès de ce nouveau média est immédiat. En 1999, on comptait à peine 20 blogs, un an plus tard, ils étaient 150 000, puis un million. Aujourd'hui, ce sont près de 10 millions de blogs actifs qui sont présents sur le Web. A tel point que le monde des nouvelles technologies, toujours friand de néologisme, a inventé celui de Blogosphère pour parler du monde des blogs. Car c'est bien d'un monde qu'il s'agit. A la fois ouvert et clos. Ouvert parce que qui le veut peut créer et publier son blog. Clos, parce que la blogospghère fonctionne en circuit fermé : « Je publie, tu me lis, tu publies je te lis, les blogs de mes amis sont mes blogs, etc ». Il suffit de considérer la liste des blogs favoris de la plupart des blogueurs (encore un néologisme) : souvent limitée à une poignée d'adresses, elle quitte rarement le champs du cercle d'amis.
Et quel rapport avec la littérature
?
Si l'on considère la qualité littéraire de la
plupart des blogs, il y a de quoi se désoler. Le monde du blog francophone est
essentiellement adolescent et se contente d'opinions sur les dernières tenues de
Brittney Spears ou bien de dénoncer cette « chiene verte de madame Poulet
qui m'a colé 3/20 à mon dernier devoire de françé alor, jé creuvé les
peuneus a son vélo, bien fé
». On trouve aussi des tentatives, parfois maladroites parfois
étonnantes d'écriture rap ou poétiques. Dans un registre plus adulte, ce sont
des espaces privilégiés où s'échangent commentaires et critiques littéraires,
fragments, nouvelles, romans par épisodes, poèmes, textes polémiques, essais et
opinions sur le monde des lettres et des idées. Ces lieux, d'une liberté rare,
permettent, mieux que sur les forums où l'immédiateté de la réaction nuit
souvent à la qualité de pensée, que se déploient des débats souvent confisqués
par la presse ou les intellectuels médiatisés. Cette tendance à l'intervention
de la société civile dans les débats, qu'ils soient politiques, sociaux ou
littéraires semble avoir été perçue par un quotidien comme Le Monde qui adjoint
à sa version en ligne différents blogs de chroniqueurs et vient même d'ouvrir un
service ouvert aux particuliers.
Phénomène de mode ou révolution durable, le blog offre aujourd'hui un espace de création sans précédent. Sa simplicité d'emploi et son retentissement sont tels qu'il permet à qui le veut d'exister et d'être lu ou vu en ligne. Le quart d'heure de célébrité warholien à l'heure de la communication électronique, en quelque sorte.
En savoir plus...
Sur le blog, ses us et ses coutumes :
Les blogs
Pointblog, un
blog sur les blogs
Les blogs littéraires :
La république des
livres, Pierre Assouline blogue sur Le Monde
Stalker, pur
et dur, une référence de la blogosphère.
Les journaux intimes :
Révolution, la schizophrénie de
l'intérieur, ça fait du monde !
A.J.,Un petit jeune qui débute... dans le blog.
Ron , l'infirmier des stars.