Chargement...
Chargement...

Belle équerre, petit moral.

91_belle-equerre-petit-moral
Publié le 10/01/2003
L'Equerre d'argent (architecture) va cette année à Dominique Lyon et Pierre du Besset, dans un contexte professionnel morose...

C'est lundi 13 janvier que Jean-Jacques Aillagon, ministre de la Culture, remettra l'Equerre d'Argent, récompensant la meilleures œuvre d'architecture édifiée en France en 2002. Ce prix, décerné par un jury d'architectes réunis par la revue Le Moniteur est en quelque sorte le Goncourt de l'architecture ainsi que le baromètre d'une profession sensible aux courants d'air. C'est la nouvelle médiathèque que Dominique Lyon, 48 ans, et Pierre du Besset, 53 ans, ont construite pour la ville de Troyes, qui cette année leur offre les lumières de la célébrité.

Ce bâtiment nous intéresse à plus d'un titre. En effet c'est la première fois qu'un lieu de conservation de l'écrit et du savoir se voit récompensé par l'Equerre d'argent d'habitude voué au sacre d'architectes de logements ou de grands programmes institutionnels.

Lyon et du Besset ont pour l'occasion pensé un bâtiment qui, faisant foin des spectaculaires " gestes architecturaux " des stars de la profession, privilégie le sens. Sens de la fonction puisque les architectes considèrent la médiathèque comme un lieu ouvert. " …Elle doit communiquer le sentiment qu'elle appartient à la communauté qui l'a construite et qui l'utilisera ". Lieu de stockage, d'enseignement et de transmission du savoir, ma médiathèque se pose également comme un lieu de vie et d'échanges pour lesquels ont été ouverts de vastes espaces au sein du bâtiment. Un parcours patrimonial permet au visiteur de découvrir les fonds anciens renfermés par la médiathèque de Troyes et ce parcours l'amène ensuite aux salles de lecture ou d'activités qui offrent, à travers une programmation variée d'évènements et d'expositions une ouverture vers la culture à un public varié et " décloisonné " selon la volonté de concepteurs.

Une architecture modeste, en somme, qui, proche de sa commande a pour seul objet de servir au mieux sa fonction et ses buts en oubliant l'architecte et sa gloire.

Ce prix modeste, pour un bâtiment réussi, est décerné dans un contexte plutôt morose puisque la presse professionnelle fait état d'un ralentissement de l'activité du secteur pour l'année 2002. Crise économique certes, mais également qualitative. Les années 80 et 90, sacralisant l'architecte en créateur ont répandu dans nos villes et banlieues pléthore de gesticulations artistico-signalétiques marquant l'attachement des commanditaires à l'architecture contemporaine dans ce qu'elle avait de moins raisonné et de plus cyniquement spectaculaire. Ces excès, comme celui de frilosité des années précédentes se paient aujourd'hui par une défiance des commanditaires alors même que le patient travail des associations professionnelles d'architectes auprès du grand public commence à porter ses fruits. Amélioration de formations, de la qualité des réalisation et de la réception du public ne sont donc pas suffisantes pour redonner à la profession le moral et l'image qu'elle mérite. C'est donc le lien de l'architecte et du citoyen que l'on doit s'employer aujourd'hui à retisser et c'est grâce à de beaux bâtiments modestes comme la médiathèque de Troyes que l'on y parviendra.

A bon entendeur…