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Breton fait recette

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Publié le 18/04/2003
La vente controversée de la collection d'André Breton a rapporté 46 millions d'euros à ses héritiers, soit près du double des estimations.

Surréaliste fut André Breton, surréaliste également la vente qui dispersait les collections d'œuvres, de livres et d'objets que refermait son appartement du 42, rue Fontaine à paris.

La profusion désordonnée de la collection laisse pourtant apparaître une grande rigueur de goût dans sa constitution. Il est en effet rare de voir ainsi un ensemble, disparate dans sa forme, composer une collection aussi cohérente.

Dépassant les estimations les plus optimistes, la vente - scandaleuse entre toutes selon des nombreux protestataires qui ont, tout au long des dix jours d'enchères, manifesté leur indignation – a rapporté 46,02 millions d'euros aux héritiers du maître surréaliste, soit 50% de plus que prévu.

Entamée le 7 avril avec la dispersion de l'immense bibliothèque de l'écrivain composée de 1692 lots de livres et 532 manuscrits, la vente a surpris les spécialistes par la qualité des lots offerts ainsi que le montant, souvent déraisonnable des enchères.

Deux stars s'opposaient lors de ces enchère, la première était le libraire d'ancien Jean-Claude Vrain, qui pour son compte ou celui de fortunés clients acheta près de 200 lots. La seconde vedette, plus discrète était l'Etat qui, à travers différentes institutions dont la Bibliothèque Jacques Doucet, préempta un grand nombre de manuscrits et d'éditions rares (215) au grand dam des collectionneurs privés.

La vente du manuscrit d'Arcane 17 fut sans conteste le clou des ces journées. Attribué pour 836 510 euros, il est le texte surréaliste le plus cher jamais vendu aux enchères. Sa préemption par l'Etat, qui pourtant ne faisait pas de doute, fut encore l'occasion de manifestations de mauvaise humeurs de la part de certains marchands.

Le 14 avril, c'était le tour des tableaux modernes d'être offerts aux convoitises fortunées. Totalisant 26,39 millions d'euros la vente ne déçut pas. Photographies, numismatique, arts populaires et arts premiers furent aussi honorés lors de ces journées. Une vingtaine de poupées Kachina ainsi qu'une statue Uli atteinrent également des enchères recond.

Cette vente ne fut bien sur pas du goût de tous, certains reprochant à l'état de ne pas avoir racheté aux héritiers d'André Breton l'intégralité du contenu de l'appartement de la rue Fontaine pour le reconstituer dans un musée, une démarche déjà entreprise avec l'Atelier Brancusi, racheté et remonté au Musée National d'Art Moderne du centre Pompidou. Une pétition lancée par d'anciens membres du groupe surréaliste soutenus par des écrivains dont François Bon a d'ailleurs circulé et recueilli près de 5000 signatures. Pas assez en tout cas pour faire reculer Jean-Jacques Aillagon, le ministre de la culture, qui jugeait inutile une telle reconstitution, estimant que les collections nationales étaient suffisamment riches en œuvres surréalistes.

L'essentiel des préemptions de l'Etat s'est d'ailleurs fait sur les fonds documentaires, manuscrits et éditions originales annotées, destinés à compléter le riche matériau déjà constitué dans le fonds Breton de la Bibliothèque Jacques Doucet.

Satisfaits et épuisés, les commissaires priseurs se sont dit heureux du résultat de la vente. On le serait à moins...