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Cartier-Bresson, poète et géomètre

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Publié le 05/08/2004
Le photographe s'est éteint mardi 3 août, à l'âge de 95 ans.

En noir et en blanc : la presse de ce jeudi 5 août est en noir et blanc pour rendre hommage à l'un des plus pertinents regards de ce siècle passé, Henri Cartier-Bresson, décédé mardi dans son village de Haute-Provence, Montjustin. Il avait quatre-vingt quinze ans.

Né en 1908, dans une famille bourgeoise vivant à Chanteloup, dans les environs de Paris, Henri Cartier-Bresson s'oriente vers la photographie après avoir, en dilettante virtuose, tâté de la peinture auprès de maîtres tels que Jacques-Emile Blanche ou André Lhôte. Ces années laisseront d'ailleurs une empreinte durable chez ce maître du noir et blanc, tant sur le plan académique que dans sa formation intellectuelle. Il fréquentera également le groupe suréaliste dont le rapport au réalisme influencera sa vision du reportage photographique en aiguisant sa capacité à déceler du suréel dans le banal. Passionné, entier, nerveux, parfois colérique, Cartier-Bresson est de ces personnages cosmopolites et universels qui promènent leur élégance dandy de savanes africaines en salons new-yorkais avec la même apparente nonchalance et un réelle attention au monde. Cet oeil qui le rendra célèbre ; c'est aussi celui de son appareil. On connaît la légende de ce maître rigoureux du cadrage qui n'utilisait que son Leica pour la qualité des ses optiques et son silence de fonctionnement, une simple optique de 50mm, la plus proche de l'oeil humain et qui s'interdisait de recadrer ses images au tirage. Imagier des rues du monde et des gens en marges, Cartier-Bresson sera également un grand portraitiste ; on connaît son Giacometti intense, sa Jeanne Lanvin mélancolique, son Matisse en robe de chambre... Mais Henri Cartier-Bresson a aussi posé sa patte inimitable sur un autre aspect déterminant du monde des images argentiques. En fondant l'agence Magnum, en 1947, aux côtés de légendes telles que Robert Capa, David Seymour et George Rodger, il fut de ceux qui donnèrent au reportage photographique ses lettres de noblesse et firent de l'actualité un sujet artistique.

"Divorcé" de Magnum ( et de sa première épouse) depuis 1966, Henri Cartier-Bresson s'était retiré en Haute-provence pour y pratiquer sa seconde passion : le dessin : «La photo est une action immédiate ; le dessin une méditation». Il s'occupait également des expositions rétrospectives qui lui étaient régulièrement consacrées, la Bibliothèque Nationale de France en 2003 et une rétrospective qui doit se tenir à la Galerie de Jeu de paume, récemment reconvertie en lieu d'exposition photographiques.

Bel oeil, belle gueule et mauvaise tête, ce dandy exigeant a incarné la figure du photographe en France et dans le Monde entier ; de son vivant, c'est certain, et pour toujours, c'est souhaitable.

Voir une bibliographie d'Henri Cartier-Bresson