Nous étions tous accrochés à nos radios en espérant voir
notre favori l'emporter. Et c'est fait : le romancier afghan Atiq Rahimi s'est
vu décerner le prix Goncourt 2008 pour son roman au titre étrange Syngué
Sabour, sous titré Pierre de patience.
Ils étaient quatre, dernier carré en lice, pouvoir espérer
la couronne du Goncourt, Là où les tigres sont chez eux, de Jean-Marie
Blas de Roblès ; Une éducation libertine, de Jean-Baptiste Del Amo ;
La Beauté du monde, de Michel Le Bris et Syngué Sabour, d'Atiq
Rahimi. C'est donc ce dernier qui l'a emporté par 7 voix contre 4 à Michel Le
Bris.
Né en 1962 à Kaboul, Atiq Rahimi a fait ses études au lycée
français de Kaboul à et l'université. En 1984, la guerre lui fait quitter son
pays natal pour le Pakistan puis la France où il obtient l'asile politique. Il
présente une thèse de communication audiovisuelle et obtient son doctorat.
Auteur de films documentaires, il publie son premier roman, Terre et Cendres, en 2000 aux éditions POL.
Suivront Les mille
maisons du rêve et de la terreur
(2002), Le retour imaginaire (2005)
et Syngué sabour en 2008. C'est ce
dernier ouvrage, écrit directement en langue française qui vient d'obtenir le
plus prestigieux des prix littéraires français.
Inspiré par la mort de la poétesse afghane Nadia Anjuman, Syngué
Sabour conte la veille et de deuil d'une femme en colère. Au commencement
silencieuse, elle prend la parole pour ne plus la rendre et prononce tous les
mots qui lui ont de tous temps été interdits. Parole de femme dans un monde qui
la musèle, ce roman dit tous les espoirs et les déceptions de son héroïne, son
impuissance face aux guerres et à la violence qui ravagent son Afghanistan. Ses
imprécations se feront actes et sa vie blasphème aux yeux des bien-pensants. Le
flot de ses paroles, enfin libéré, emportera tout, y compris celle qui les
prononce.
On dit qu'il existe une pierre magique à laquelle ont peut
se confier. La pierre, témoin des peines de celui ou celle qui la détient,
gonfle et s'enfle de tous ces mots, ces secrets. Puis un jour, elle éclate,
libérant de toutes ses souffrances celle
qui lui a tant parlé. En afghan, cette pierre de patience se nomme Syngué sabour.
Renaudot
Respectant la tradition, le prix Renaudot a été décerné quelques minutes après son glorieux aîné. Suivant la même voie, il a consacré un auteur qui n'est pas né en France. Tierno Monénembo est l'auteur d'un Roi de Kahel qui a sû séduire le jury. Cette histoire rocambosleque d'un explorateur, Aimé Oliver de Sandoval, admirateur de la civilisation peul au point d'en devenir membre et roi. Les éditions du Seuil, éditeur de Tierno Monenembo depuis 1979, voient ici récompensé un engagement de toujours pour la diffusion des littératures africaines.
Dans la librairie, inutile de vous dire que l'on est heureux. Vous avez pu le lire ici et là, les récents primés étaient depuis leur parution défendus becs et ongles par les libraires en magasin, en ligne sur ce site, ainsi que sur leur blog. Souhaitons maintenant à ces romans une carrière aussi belle que celle qu'ils connaissent chez Mollat.
A noter que la venue, prévue de longue date, d'Atiq Rahimi dans nos murs pour une rencontre dédicace dans les salons Albert-Mollat est confirmée. Pensez à ajouter cette date sur vos agendas !