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L’urine au jardin et ailleurs mode d’emploi, conseils pratiques ou idées confuses et secrètes !

Une actualité de Jérémy Gadras
Publié le 05/05/2017
L’urinothérapie, l’urine-engrais, l’ondinisme ou l’omorashi, autant de taxinomie à la poétique phonétique rassemblant quelques pratiques insolites faisant usage de l’urine.

Un éloge de l’or jaune semble malaisé… voire risible… et une simple introduction n’en reste pas moins délicate, falote ou drôlette ! Ce liquide flavescent, ambré ou topaze, constitué de 95% d’eau, d’urée et de créatine (en somme un apport de vitamine C et un soupçon d’acide animé), sera néanmoins le centre d’intérêt de ces quelques lignes, de ce mince filet de mots voué à présenter les multiples facettes d’un terme si quotidien, si usuel et d’une matière que l’on produit approximativement à raison d’un litre à un litre et demi par jour – calcule plus ou moins simple, une production avoisinant les 38 000 litres au cours d’une vie !

Entre mythe et légende, suspicion et perplexité, enthousiasme ou dégout, idée inflexible ou théorie inébranlable, l’urine force la curiosité des uns, offusque les autres,  brouille les décences, s’introduit dans l’intimité, se fait breuvage, remède, substance aux mille vertus ou objet de répugnance et d’aversion lorsqu’on lui prête ces quelques faveurs.

Conseillé pour un régime dit « urinothérapeutique », l’urine en petite goulée ; issue d’une production personnelle, avec un grand verre d’eau et accompagnée d’une alimentation biologique saine ; procure des effets qui seraient tout aussi salvateurs que le jeûne, même si aucune preuve scientifique n’accrédite ce « bon remède » ancestral –  le livre XXVIII de l’Histoire naturelle de Pline l’Ancien, dans lequel il aborde « l’urine médicale », serait l’une des premières mentions des bienfaits de l’urine ! Bénéfique pour panser quelques affections (puisque désinfectant), alléger les allergies respiratoires, soulager l’eczéma ou encore soigner de la dermatite, utilisé en Inde en l’incorporant à des crèmes pour visage, l’urine parcimonieuse rendrait la peau plus douce, favoriserait une meilleure santé et pourrait revivifier quelques fatigues passagères !

Si les bienfaits sur la santé restent encore douteux - les quelques conseils médicaux souvent objectés par les septiques - nous connaissons mieux les répercussions positives sur la nature et ses vertus quasi essentielles pour le jardin. L’azote, le phosphore et le potassium sont des composants de l’urine s’avérant également être des nutritions importantes pour la pérennité des plantes. Fertilisant hors pair, l’urine peut se confirmer très bon engrais pour nettoyer et alimenter la flore tout en participant au geste écologique visant à amoindrir l’utilisation de combustibles fossiles que l’on trouve en forte quantité dans les engrais chimiques. Au même titre qu’une consommation humaine, l’urine se doit d’être diluée dans une quantité supérieure d’eau (une mesure d’urine pour 10 mesures d’eau). Si la personne est en très bonne santé (oublions les gros fumeurs et les grands passionnés de rogommes, tord-boyaux ou remontants journaliers), son eau jaune stérile enrichira son potager, son verger ou son ornement végétal dont un balcon ou une fenêtre s'apprêtent en décorum). Sans cette dilution conseillée, vous l’utiliserez comme désherbant, vaporisant pour arbustes d’hiver, remède d’affections fongiques ou tout simplement comme accélérateur du développement de compostage. Si le moindre doute vient perturber vos expériences futures de nouveau jardinier, Renaud De Looze vous donne de précieux conseils dans son ouvrage fructueux et lucratif en connaissances, L’urine, de l’or liquide au jardin : guide pratique pour produire ses fruits et légumes.

Oui oui !

Ce que l’on sait moins, ou feint de ne pas savoir : son côté mignon, son usage intime, son intromission dans l’indéfinie liste des fantasmes, son action haptique à l’orée d’une nuit charnelle, son érotisation ou encore son attirance…

L’ondinisme, mots aux résonnances féeriques ou magiques que l’on prêterait volontiers à un conte des Mille et une Nuits à la lumière de notre grande naïveté, n’est autre qu’une pratique alliciante ou alléchante pour qui l’applique. Du Marquis de Sade au Mille et une Verges et Les Exploits d’un jeune Don Juan d’Apollinaire, Roberte ce soir de Klossowski ou encore dans les confidences et confesses de Paul Léautaud, la littérature sera user de l’image sublimée ou obscurcie de ce liquide naturel, lorsqu’il n’est pas poétiquement synonyme d’une affliction imposée dans l’univers Pasolinien.

« Je bois dans ta déchirure et j’étale tes jambes nues » criait Bataille, poursuivant son exploration des limites de l’expérience humaine dans une dimension transgressive de la « sexualité profonde ». L’expérience ainsi que la citation de l’urine prendra sens dans son Histoire de l’œil, avec son trio infernal, Don Aminado, Simone et Sir Edmond. Bataille devient le chantre de cette pluie fine, de ces vagues intermittentes qu’il goute à l’encolure d’un sexe humide. L’urine devient embrun d’or érotique, éveille, stimule, affriole ou répugne, blesse ou déconcerte son lecteur. Qu’en à l’omorachie, l’excitation à la vue d’une vessie pleine, elle donne à l’urine invisible un pouvoir de suggestion digne d’une cheville dévoilée, d’une naissance de poitrine offerte ou du simple dévoilement d’une peau que l’on désire effleurer ou sentir.

Les « Figures pissantes » (ne les oublions pas), petites représentations exhibant leur sexe pour en extraire à la vue du passant alerté un filet d’eau nourrissant fontaines de pierres, rivières botaniques ou autre œuvre artistique urbaine, intriguent, questionnent qu’en à leur iconographie, leur sens et leur création. Un livre récent donne d’ailleurs quelques éclaircissements bienvenus sur l’histoire de cette figure en train d’uriner. Dans la sculpture, la gravure, la peinture, la photographie, l’auteur Jean-Claude Lebensztejn fouille les origines de cette représentation allant de l’Antiquité tardive jusqu’au Piss Christ du photographe Andres Serrano, en nous offrant pas moins de 161 illustrations pour étayer son analyse historique et iconographique. L’on y croise la Pisseuse de Picasso, Bacchus enfant de Guido Reni, les vidéos d’Itziar Okariz, A History of sexe de Serrano. Curieuse recherche, certes, mais des plus fascinantes !

En lien alambiqué avec notre vitrine « pisser dans son jardin », ce mince texte ne servira qu’à attribuer les bienfaits de l’urine à de nouveaux usages, parlera à qui s’y retrouve ou à qui désire jouir des vertus d’un liquide peu aimé ou la côte de popularité serait à comparer avec celle de la transpiration ou d’exsudations corporelles autres…

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