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Delphine Gardey - Le corps noir de la République : de l'esclave au député (1789-1946)

Une histoire méconnue de la République française : quand les députés colonisés siégeaient à l'Assemblée.
Publié le 01/10/2025
Delphine Gardey vous présente son ouvrage "Le corps noir de la République : de l'esclave au député (1789-1946)" aux éditions Textuel.
Dans son livre "Le Corps noir de la République", Delphine Gardey retrace une histoire méconnue : celle de la contribution des députés colonisés à la construction de la République française. De 1789 à 1946, ces hommes, et quelques femmes, ont siégé à l'Assemblée, incarnant un paradoxe au cœur du républicanisme français : celui d'une promesse universelle de liberté et d'égalité coexistant avec une pratique de domination et d'exclusion.

L'ouvrage s'appuie sur une riche iconographie, tout en soulignant le biais que représente la surreprésentation des images produites par les colons. L'autrice explique qu'il est crucial d'analyser ces images pour comprendre les rapports de pouvoir et la production d'imaginaires racistes, tout en cherchant et en valorisant les productions visuelles, plus rares, réalisées par les personnes concernées.

Delphine Gardey met en lumière des trajectoires individuelles et collectives, de figures connues comme Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor à des personnalités plus obscures, comme le premier rédacteur en chef noir de l'histoire de la presse française, Cyrille Bissette, ou le communard Melvil-Blanccourt. Ce récit montre les mobilités sociales et politiques inédites, les combats, les solidarités, notamment panafricanistes, et les désillusions de ces députés.

L'autrice insiste sur une bifurcation majeure de l'histoire coloniale française. Si les « vieilles colonies » comme les Antilles ont pu obtenir des droits de représentation dès les premières Républiques, la Troisième République, en pleine expansion coloniale, a instauré un système à double standard. Les populations des nouvelles colonies d'Algérie ou d'Indochine sont devenues de simples « sujets » sans droits politiques. Il faudra attendre la Libération de 1945 pour voir l'Assemblée nationale s'ouvrir à des députés issus de l'ensemble de l'empire, reconnaissant ainsi la mobilisation des forces coloniales dans la guerre.

Le livre est un travail de synthèse qui vise à réparer une lacune historique en montrant que ces hommes et ces femmes ont cru en les promesses de la République, ont façonné ses institutions, même s'ils n'ont pas toujours obtenu les droits qu'ils réclamaient pour leurs peuples. C'est un récit de la complexité de l'histoire républicaine, à la fois fidèle à ses idéaux et en contradiction avec eux.
Bibliographie