C'est toujours une sensation de retrouver Céline Minard qui bâtit une
œuvre en se moquant des courants et des vagues, et n'hésite pas cette
fois-ci à nous projeter en pleine conquête de l'Ouest avec tout ce que
cela comporte d'imageries et de clichés qu'elle envoie joyeusement et
talentueusement dinguer. C'est un western, comme on n'en écrit quasiment
plus, un western qu'aurait traversé toute la littérature du XX° pour
lui insuffler une puissance d'évocation tenant plus à la langue qu'aux
images réinventées. Au centre du livre Eau-qui-court-sur-la-plaine, une
Indienne seule rescapée de son clan qui pratique des guérisons sur des
Blancs incrédules et des Indiens méfiants (ou inversement). Elle va
rencontrer deux frères, Jeff et Brad, qui font péniblement avancer leur
char à bœufs avec leur increvable mais mourante vieille mère, elle
croisera Gifford qu'elle sauve de la variole, Bird Boisverd qui veut
récupérer son cheval volé, beaucoup de gens au bout du conte qui se
bousculent au générique et dont le destin va basculer au cœur de cette
Amérique qui s'invente dans la poussière des illusions. C'est riche en
bruits, fort en fureur, ça possède un goût que personne d'autre ne sait
infuser, c'est la marque d'un écrivain qui confirme livre après livre
son importance.
Retrouvez également
le podcast de la rencontre avec Céline Minard, que nous avion invitée à la librairie au mois d'octobre pour nous parler de ce roman.