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Il y a un monstre dans mon livre !

Publié le 13/11/2008
Les monstres nous fascinent autant qu'ils nous terrifient. Mais où sont-ils ? Dans notre quotidien ou encore en nous-même ?
Visible ou invisible, jouant à cache-cache dans l'obscurité, le monstre opère chez l'enfant – comme chez l'adulte – une véritable catharsis, mêlant en lui dégoût et délice…

Le monstre est par définition celui que l'on exhibe, que l'on montre. C'est le monstre de foire,  l'être difforme – le « freak » exposé pour la monstruosité de son anatomie comme l'illustre avec émotion François Roca dans Jésus Betz, ou pire encore l'être que l'on mutile comme le malheureux héros de L'homme qui rit pour mieux le produire devant des foules avides de sensationnel et d'horreur. Être difforme, le monstre provoque la répulsion tout en attisant la curiosité et donc l'envie de s'en approcher. Il est la preuve de l'existence d'un monde non régi par la norme, il inquiète et dérange par l'idée que l'animalité se mêlerait à l'humanité.

Il suffit de lire l'Histoire d'un qui s'en alla pour apprendre le tremblement (in Les trois plumes des frères Grimm) pour comprendre à quel point la peur est un sentiment inhérent à la nature humaine au même titre que l'amour. Celui qui ne connaît pas la peur est incomplet, inachevé, voire idiot ! Reste à se frotter à sa peur et à l'apprivoiser.

C'est bien ce qui est à l'œuvre dans les albums pour enfants dans lesquels la figure du monstre va permettre au lecteur de se confronter à l'étrange, au terrifiant, souvent par le biais de l'humour. Au début des années 60, Max et les maximonstres ouvre la porte à l'image transgressive que véhicule l'idée du monstre. Le monstre est le miroir de l'enfant, celui qui lui permet d'exprimer son désir de se frotter aux interdits que lui imposent la société et donc ses parents. Max désobéit et affronte ses propres pulsions : peur et plaisir de transgresser s'entremêlent jusqu'à l'apaisement final. Si dans Max… comme dans Qui es-tu ?, Monstres malades ou encore Au lit, petit monstre le monstre est le double de l'enfant, celui qui l'accompagne puisqu'il est en lui, le monstre peut être aussi bien maltraité dans les albums pour enfants. Il peut mourir dans d'atroces souffrances : Le monstre poilu de Pef explose de fureur sous les calembours d'une fillette qui ose le défier, l'horrible bestiole dentue de Dans la gueule du monstre explosera faute – entre autres !– d'avoir trop mangé. Comment ratatiner les monstres propose même de s'en débarrasser : c'est dire si l'inquiétude de les rencontrer est grande dans l'imaginaire enfantin. D'autant plus que leur lieu de résidence favori reste la chambre : Il y a un cauchemar dans mon placard, Chasse au monstres : ils sont partout dans la maison !, Du bruit sous le lit, Un monstre sous le lit, ou encore Lilou chasse les monstres dans lequel l'héroïne, courageuse petite lapine, chasse les monstres qui peuplent non pas sa chambre mais sa tête pendant la nuit et ce, grâce à un médecin qui lui conseille la lecture d'un livre. De là à penser que les livres vont faire de tous les enfants des Saint Georges combattant leurs dragons intérieurs…

Une des idées fortes concernant les monstres en littérature de jeunesse est qu'il est nécessaire parfois de les éduquer pour qu'ils soient fréquentables. On peut les terrasser si on leur lit des histoires (Le monstre qui aimait les histoires), leur faire oublier leur goût immodéré pour la chair humaine en leur expliquant les joies d'une alimentation variée et équilibrée (Lili Callisson et l'horrible monstre vert ou Le géant de Zéralda) : on impose la norme face à la révolte.

Les éduquer c'est bien mais les choyer et apprendre à les connaître c'est encore mieux. Mémoires d'un chasseur de monstres permet de mieux les identifier et les cataloguer avec humour, Monstres et dragons en donne un inventaire rigoureux tandis que le dico des monstres en dresse des portraits rimés empreints de poésie aussi drôle que décalée. Les choyer disions nous ? Et oui, s'il n'y avait qu'une information à retenir de tout cela c'est que TOUS les  monstres ont peur du noir et certains même si l'on en croit l'hilarant et désormais classique Papa ! de Corentin ont même peur des enfants !

Dernier conseil : pour lutter contre sa peur, chanter haut et fort est un remède souverain. Alain Schneider a composé spécialement pour cela Monstres à tue-tête, 14 chansons rigolotes pour apprivoiser les monstres qui vivent sous nos toits. Allez, les monstres, avec moi, tous en chœur ….

Bibliographie