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Les "femmes fatales" ouvrent le bal...

Une actualité de Véronique M.
Publié le 28/03/2018
Jusqu'en juin, nous vous proposons de nombreux événements à la librairie (rencontres, concours et cadeaux) et de revenir sur certains aspects qui font la richesse de la littérature policière. Premier arrêt sur une figure archétypale et incontournable du genre : la femme… fatale, évidemment !

 Modèle du romantisme noir au XIXème siècle avec Carmen, Colomba ou encore Salomé, la "femme fatale" émerge au début du XXème siècle, notamment grâce à l’essor du roman policier anglo-saxon. Bien des pulps des années 1920 à 1950 connaissent une adaptation sur grand écran devenus plus célèbres que leurs modèles littéraires : qui se souvient que le personnage d’Ava Gardner dans "Les Tueurs " est tiré d'une nouvelle d’Ernest Hemingway ? ou encore que Rita Hayworth dans "La Dame de Shangaï" a d’abord été imaginée par un certain Sherwood King, aujourd’hui oublié ? C’est également le cas de Gene Tierney dans "Laura" d'Otto Preminger qui a dépassé la notoriété de son auteure Vera Caspary,  alors que les blondes incendiaires jouées par Lana Turner dans "Le facteur sonne toujours deux fois", et Barbara Stanwyck dans "Assurance sur la mort" n'ont pas totalement éclipsé les romans de James M. Cain.

 Ces sublimes actrices de l'apogée du cinéma hollywoodien ont largement contribué au fantasme d’une créature irrésistible, symbole de tentation et de perdition. Le cinéaste Benoît Jacquot propose dans son dernier long-métrage "Eva" sa vision de la femme fatale avec Isabelle Huppert dans le rôle-titre à contre-courant du cliché véhiculé à la fois par le  chef-d’œuvre éponyme de James Hadley Chase  paru dans la naissante Série Noire en 1947, et par l'interprétation de  Jeanne Moreau dans le premier film de Joseph Losey en 1962. Soixante-dix ans après le roman, Eva demeure insaisissable, d’une ambiguïté aussi brûlante que glaciale d’indifférence, aiguisant le désir inassouvi de son amant décidé à la battre à son propre jeu. Non sans humour et une analyse fine de personnages aux multiples visages, sa nouvelle adaptation prouve que ce premier des grands thrillers psychologiques n’a rien perdu de son mystère.

Chez James Ellroy, « chercher la Femme » tourne aussi à l’obsession et à la mort ("Le Dahlia noir", "L.A confidentiel"), comme le narrateur du "Rêve des chevaux brisés" en quête de la résolution d'une énigme féminine et familiale. Chez Ron Rash, "Serena" demeure aussi  belle qu’indomptable à l’image de la nature et des hommes de la Caroline du Nord.
Saluons la réédition chez Gallmeister du roman hilarant écrit par Charles Williams en 1957  "Fantasia chez les ploucs" sous son titre original "Le bikini de diamants" bien plus évocateur de la fascination des regards mâles sur le minuscule bout de tissu qu'arbore Miss Choo-Choo Caroline, strip-teaseuse traquée ni plus vraiment innocente. Dans le registre parodique, n’oublions pas le bijou d’humour noir "The Blonde" de Duane Swierczynski ou la comédie policière et aventurière  "L’avocat, le diable et la princesse masquée" du Belge Paul Colize. 
 Dans "Fatale" de Jean-Patrick Manchette (1977), nous ne pouvons oublier que la tueuse à gages Aimée porte « un calibre 16 à la bretelle », ou encore l’incroyable" Betty" d’Arnaldur Indridason, hommage au grand classique "Assurance sur la mort" de James M. Cain, et qui réserve une surprise à tous les lecteurs. Impossible de ne pas suivre Jessica, paumée magnifiquement attachante, qui accueille Franck à sa sortie de prison et (nous) amène dans son cauchemar au fond de la forêt landaise dans le fiévreux "Prendre les loups pour des chiens" de Hervé Le Corre.

 Récemment nous avons lu et aimons le troisième livre de Jake Hinkson : "Sans lendemain" reprend avec brio les romans et films noirs  en imaginant que son héroïne Billie tombe amoureuse de l'épouse du pasteur... une liberté risquée quand on est une femme en 1947 !
Les écrivains n’hésitent plus à jouer avec tous les codes du genre et dynamitent joyeusement le mythe, tout en rendant hommage à ces figures de garces jadis immortalisées par cette réplique de Sam Spade le détective du Faucon de Malte crée par Dashiell Hammett en 1930 : "You're a damned good man, sister" / "T'es un sacré mec, petite"... Toujours culte !

A l'origine : quelques classiques du genre

Age d'or de la femme fatale et du roman noir

Les femmes sont aussi fatales dans le polar français

Quelques brillantes variations contemporaines du mythe