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Céline (1894-1961), 50 ans après (I)

Publié le 22/06/2011
David Alliot, l'auteur D'un Céline l'autre (Laffont), était présent le 15 juin dernier dans les salons Mollat afin de présenter un homme et une œuvre qui ne cessent de soulever les passions et susciter les commentaires les plus vifs !État des lieux et portrait
Le retrait récent de l'écrivain par le Ministre de la culture des commémorations nationales pour l'année 2011 a de quoi ranimer le débat autour de sa légende noire qui hésite toujours entre l'adulation pour le génie immortalisé avec son premier roman Le Voyage au bout de la nuit (1932) et l'exécration pour le monstre qui rédigea quelques années après trois ignobles pamphlets antisémites, depuis lors interdits à la vente. De nombreuses parutions et rééditions depuis le début de l'année tentent de cerner ce destin unique dans la postérité littéraire : nous en proposons ici un échantillon bibliographique comme autant de clés biographiques et/ou critiques.

L'amateur de pures données historiques pourra déjà se plonger dans la vie proprement romanesque de Céline parmi plusieurs références incontournables. La première, d'envergure, est celle rédigée entre 1977 et 1985 par l'avocat François Gibault, alors que la critique commence à sortir de son purgatoire l'écrivain maudit : disponible en trois tomes au Mercure de France, elle fait toujours autorité parmi les céliniens. Maître Gibault tente de réhabiliter la mémoire de son sujet, lançant également dans la préface au récent d'Un Céline l'autre (Laffont) un plaidoyer en faveur d'un homme qu'il dit « fragile » et « humaniste » malgré ses regrettables erreurs… En 1987, François Vitoux publie La Vie de Céline, ample biographie rééditée en format de poche (chez Folio) qui fait la lumière sur l'antisémitisme de l'auteur en risquant des hypothèses psychologiques, des prédispositions familiales, ou le contexte politique. Sans récuser ses délires racistes, il dépeint un « homme blessé, solitaire » dont les haines ne furent que l'envers de l'hostilité qu'il suscita. A partir de son retrait à Meudon au début des années 1950, il se présente comme persécuté, victime d'un opprobre général. En 2004, le célinien Émile Brami inaugurait la collection « Céline et Cie » aux éditions Écriture en livrant une nouvelle biographie de l'écrivain intitulée Je ne suis pas assez méchant pour me donner en exemple (en format poche sous le titre : Céline à rebours) et assortie de nombreux extraits de ses œuvres et de sa correspondance. Notons la révision revue et augmentée de Céline entre haines et passions dans laquelle Philippe Alméras – qui a également signé un Dictionnaire Céline à ce jour inégalé - offre aux lecteurs un « Céline total » réconciliant le romancier encensé et le pamphlétaire maudit, reprenant par là la démarche de George Steiner et de Philippe Sollers. L'ouvrage de ce dernier, simplement intitulé Céline vient d'être réimprimé : on y retrouve ses différents textes consacrés pendant près de quarante ans à cet écrivain majeur qu'il invite à « relire de fond en comble ». Henri Godard, éditeur de Céline en Pléiade et déjà auteur de Céline scandale ou Poétique de Céline, vient de publier chez Gallimard une ample biographie de référence couronnant près de quarante ans de recherches. Son Céline nous offre un éclairage bien plus nuancé voire inédit sans jamais le justifier : tout en rendant compte de la complexité de son antisémitisme qui n'a cessé d'évoluer, l'universitaire pointe sa dimension compassionnelle et la poésie de ses textes influencés par Pascal, Dostoïevski, Shakespeare mais aussi Chateaubriand ou même, plus surprenant, La Fontaine…

Entre la biographie (im)partiale et l'essai critique (ou pamphlétaire) qui prend parti sur les zones d'ombre de Céline, le lecteur pourra se reporter au Céline l'homme en colère dans lequel Frédéric Vitoux découpe son approche en quelques temps forts : il retrace la vie de l'homme puis fait méthodiquement le tour chronologique de ses œuvres (un court chapitre est consacré à chacune d'entre elles) avant d'analyser les traits saillants du style du « dernier musicien du roman » tel qu'il se définissait lui-même. Il rappelle l'itinéraire de Louis-Ferdinand Destouches, du jeune médecin issu d'une famille de petits commerçants qui par vocation soigna les plus démunis à celui qui se fit connaître sous le prénom emprunté à sa grand-mère affectionnée (Céline), avant d'en venir à une écriture en totale rupture avec l'académisme de ses pairs, à savoir le langage et les codes romanesques, moraux. Si ses œuvres témoignent également d'une vaste culture classique, l'écrivain méprisait ses contemporains comme la réédition de Céline en verve le donne à découvrir à travers ses critiques acerbes de Malraux, Gide, Proust ou Robbe-Grillet.


Lien vers la seconde partie de notre dossier Céline


Œuvres de Céline

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