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Faire l'histoire ? L'action historique en question

Publié le 10/11/2008
C'est le passionnant thème qu'ont choisi d'aborder Bruce Bégout et Christophe Bouton en compagnie de Jean-François Courtine (Paris-IV/Archives Husserl), Marc Crépon, Marc de Launay et Jean-Claude Monod (CNRS/Archives Husserl) ce mercredi 26 novembre à l'université Bordeaux 3.

Dans son article séminal sur « Le concept d'histoire », R. Koselleck écrit : « C'est seulement après que l'idéalisme allemand l'a conçue comme un processus d'auto-réalisation de l'homme que l'histoire peut être considérée comme faisable et productible, elle qui autrefois « arrivait » et, d'une certaine manière, advenait indépendamment des hommes » (« Le concept d'histoire », in L'Expérience de l'histoire, trad. fr. par A. Escudier, Paris, Le Seuil/Gallimard, 1997, p. 95). L'idée de la « faisabilité » (Machbarkeit) ou encore du « caractère disponible » (Verfügbarkeit) de l'histoire se rencontre bien au-delà de l'idéalisme allemand, chez Marx, sous une forme équivoque, ou chez des auteurs aussi divers que H. von Treitschke, Ernst Bloch, Castoriadis. Certains philosophes, comme Arendt, la critiquent au contraire dans la mesure où cette idée est identifiée à une volonté de fabriquer l'histoire de manière totalitaire. Mais cette idée n'est pas le monopole du totalitarisme, elle est même présupposée de nos jours par un grand nombre d'hommes politiques qui entendent « faire, construire l'Europe » par exemple, ou faire jouer à leur pays un rôle déterminant dans l'histoire mondiale.

Bien qu'elle soit présente dans l'air du temps et qu'elle passe souvent comme une évidence, l'idée de « faisabilité » de l'histoire, sans être absurde, est problématique à plus d'un titre et soulève une série de questions sur les conditions et les limites de l'action historique, qui s'adressent tout autant aux philosophes qu'aux historiens, ou même, dans le cas de Marx, au philosophe qui se fait historien. L'histoire, telle que l'a pensée ce dernier, est-elle l'œuvre de la praxis des hommes (E. Bloch), ou un « processus sans sujet ni fin » (L. Althusser) ? Comment un grand historien du XXème siècle comme Droysen, ancien étudiant de Hegel, pense-t-il l'action historique ? La question de la faisabilité de l'histoire fait l'objet d'un traitement plus critique au XXème siècle. Dans l'École de Francfort, Adorno y voit une résurgence de l'idéalisme, et dans une autre perspective, Odo Marquard l'interprète comme un avatar de la théodicée leibnizienne. L'idée que les hommes font leur propre histoire est-elle une illusion pure et simple, répandue aussi bien chez les dirigeants politiques que chez les peuples qui sollicitent leur intervention ?

- Christophe Bouton


Mercredi 26 novembre 2008
Université de Bordeaux 3
Salle des Actes
UFR de philosophie, 33600 Pessac
Tramway ligne B, station « Montaigne-Montesquieu »

Centre « Lumières, Nature, Société » (LNS, EA 4201)
Archives Husserl (CNRS UMR 8547)
Institut Universitaire de France


 

Bibliographie