Thoreau, remis sur le devant de la scène intellectuelle depuis quelques années, est un auteur prolifique dont nous ne connaissons pas forcément toute l'ampleur. Nous pensons essentiellement au récit de sa retraite de deux ans près du lac Walden ou à son positionnement contre l'esclavage, mais son œuvre est très dense et se caractérise par la littérature, la poésie, ou encore la philosophie politique, tous ses écrits nous donnant un éclairage sur la vie qu'il mena entre 1817 à 1862. Aujourd'hui, plusieurs éditeurs et traducteurs se sont penchés sur ses textes, nous permettant de lire, apprécier et comprendre Thoreau et toutes les facettes de son esprit. Car on ne perçoit pas la même chose selon que l'on lit Walden, L'Esclavage au Massachusetts, L'Histoire naturelle du Massachusetts ou encore son Journal. Tout son parcours prend sens : depuis sa formation à Harvard avec les transcendantalistes, et notamment Ralph Waldo Emerson, la prise de notes et ses commentaires de lectures, ses réflexions devant servir pour des conférences ou publications, l'écriture de tout ce qu'il pensait et observait, jusqu'à l'écriture méthodique, jour après jour, d'un journal (rédigé de 1837 à 1861), où parmi toutes les notes et toutes les thématiques abordées, on voit sa pensée se former plus nettement, s'affiner.
Son œuvre la plus connue, Walden, fait le récit de ses deux ans passés près d'un lac, dans une cabane qu'il avait lui-même construite, où il s'était retiré afin d'expérimenter la solitude, l'étude de la nature, dans le but de développer ses réflexions philosophiques et de mettre en pratique ses théories (il ne s'agit pas d'une volonté de s'isoler définitivement de la vie en société, il retourne régulièrement en ville, c'est simplement d'un moyen d'expérimenter ses théories). Thoreau invite les autres à prendre son expérience pour exemple : sa philosophie invite à se changer, en tant qu'individu, afin de construire un monde différent. Apprendre à apprécier ce qu'il y a de bon dans les gestes simples du quotidien, loin des "valeurs" de la société de consommation qui sont en réalité des vices. Pour lui, il est essentiel de se concentrer sur soi, il prône une vie en retrait du monde, aider les autres ne l'intéresse pas vraiment. Pour lui changer le monde et son fonctionnement établit passait par soi : être simple, vrai, heureux.
Cette vision et cette absence d'engagement évoluent par la suite, puisque que Thoreau s'engagera plus tard contre l'esclavage, remettant en question sa posture de retrait, avec des textes comme Plaidoyer pour le capitaine John Brown, L'Esclavage au Massachusetts, La Désobéissance civile ou Résistance au gouvernement civil. On y découvre un Thoreau décidé à s'impliquer davantage dans la vie politique, notamment en faveur de l'abolition de l'esclavage. Son séjour en prison pour avoir refusé de payer une taxe montre ainsi son opposition à un État esclavagiste (même si on apprend que ce séjour ne durera qu'une nuit et que l'incident fut clôt car une de ses connaissances paya pour lui). Sa conscience politique, son refus de participer à un État esclavagiste et violent sont donc de plus en plus développés, même si sa posture principale reste celle d'un homme en retrait de toute organisation active. Thoreau nous donne donc de bons moyens de lutter, des exemples à suivre, qu'il faut appliquer.
L'autre aspect marquant de son œuvre est sa fascination pour la nature : il aimait s'y réfugier mais aussi l'étudier, arborant une posture de naturaliste et étudiant avec minutie ce qui l'entourait.