Robert Badinter n’a jamais considéré le droit comme une simple mécanique, mais comme un instrument pour défendre la dignité humaine. Avocat brillant, il s’est illustré dans des procès retentissants, non pas pour la gloire mais pour faire entendre une idée simple : « Il n’y a pas de justice sans humanité. » L’expérience des condamnations à mort qu’il a dû affronter dans les années 1970 – notamment celle de Roger Bontems – a nourri sa conviction que la peine capitale n’était pas la justice. Devenu garde des Sceaux, il a porté ce combat à la tribune de l’Assemblée nationale en 1981, livrant un discours resté dans l’histoire, où il affirmait : « Demain, grâce à vous, la justice française ne sera plus une justice qui tue. » Cette loi abolitionniste, qui aurait pu rester une victoire politique, fut avant tout pour lui une victoire morale : celle d’un pays qui choisissait la vie contre la barbarie. Mais réduire Badinter à l’abolition de la peine de mort serait trop réducteur : toute sa carrière a été marquée par la lutte contre l’antisémitisme, le racisme, et par un engagement sans faille en faveur de la dignité de la personne, toujours guidé par ses convictions humanistes.
Si Robert Badinter entre aujourd’hui au Panthéon, c’est parce qu’il a su donner à la justice française une voix profondément humaine. En l’honorant, la Nation rappelle qu’il a incarné, jusqu’au bout, l’idée d’une justice au service de l’homme.