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Philippe Jaccottet (1925-2021)

Une actualité de Véronique M.
Publié le 27/02/2021
Disparu ce mercredi à l’âge de 95 ans, Philippe Jaccottet demeure l’une des dernières grandes voix de la poésie du XXème siècle.
A côté d’une oeuvre impressionnante qui mêle prose, poésie, notes, journaux, sans oublier une abondante correspondance, son travail s’est intensément nourri des auteurs qu’il a traduits (Homère, Rilke, Thomas Mann, Leopardi, Robert Musil, Hölderlin, Mandelstam, Anna Akhmatova, entre autres) et de ses contemporains amis : André du Bouchet, Ungaretti, Gustave Roud, Henri Thomas, Francis Ponge, Jacques Dupin…

L’émerveillement infini face à la nature entourant Grignan, son refuge du sud de la France depuis 1953, était son inépuisable inspiration. Poète de l'émotion et de la sensation, son écriture privilégiait l'effacement du sujet pour laisser affleurer le mystère, l’invisible : “On marche ainsi entre le secret et l’aveu, la retraite d’ombre et le risque, et c’est cette double possession qui est belle”.

A côté de La Semaison, ensemble de trois carnets de prose poétique rédigés entre 1954 et 1998, ses chroniques et souvenirs de lectures rassemblés dans L’Entretien des muses et Une transaction secrète (Poésie/Gallimard) dessinent une histoire personnelle du genre poétique, sans que l’écrivain ne s’impose jamais en théoricien ou intellectuel. N’était-il pas lui-même cet “Ignorant” dans le poème éponyme daté de 1957 :
Plus je vieillis et plus je croîs en ignorance
plus j’ai vécu, moins je possède et moins je règne.

Tel le rouge-gorge illuminant son jardin, le poète est ce “messager sans vrai message” qui refusait tout lyrisme pour nous faire entendre la plénitude de son chant  :

“L'oiseau porte dans son plumage, qui est couleur de la terre sur laquelle il aime tant à marcher, cette sorte de foulard couleur de feu apprivoisé, couleur de ciel au couchant. Ce n'est presque rien, comme cet oiseau n'est presque rien, et cet instant, et ces tâches, et ces paroles. A peine une braise qui sautillerait, ou un petit porte-drapeau, messager sans vrai message : l'étrangeté insondable des couleurs. Cela ne pèserait presque rien, même dans une main d'enfant.” (Et, néanmoins)


Derrière la simplicité apparente d'un langage qui s’adresse à chaque lecteur, il opposait au néant le murmure d’une présence fragile, discrète, à la fois lucide et invincible : “paroles non pas pour les morts (qui l’oserait désormais?) mais pour le monde et dans ce monde” (Notes du ravin)


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Pour le (re)découvrir, une anthologie de textes sélectionnés par l’écrivain suisse sous le beau titre L’encre serait de l’ombre était parue en format poche en 2014. A l’instar de René Char ou Saint-John Perse, Philippe Jaccottet était le troisième poète à avoir connu de son vivant les honneurs de la collection de la Pléiade qui lui a consacré la même année un volume d’œuvres choisies accompagnées d’un précieux appareil critique, de L'Effraie (son premier recueil en 1953) à Ce peu de bruits (2008), l’un de ses derniers livres.

Une semaine après sa disparition, Gallimard annonce la parution le 4 mars de deux recueils inédits : Le dernier livre de madrigaux contiendra une trentaine de poèmes, et des notes récentes seront réunies dans La Clarté Notre-Dame. Le 19 mars, Le Bruit du temps et La Dogana coéditent Bonjour monsieur Courbet, ses écrits sur l’art rédigés entre 1956 et 2008.

Son oeuvre poétique

Notes, carnets, chroniques

Ses traductions

Quelques livres sur l'homme et l'oeuvre

Pour en savoir plus

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