À côté des logiques des gouvernants, les gouvernés prennent la parole, agissent aussi : certains manifestent dans les rues de nos cités, d'autres restent chez eux mais n'en pensent pas moins, d'autres encore occupent des espaces publics, veulent inventer ici et maintenant de nouveaux mondes, promouvoir les partages des richesses, pousser à la gratuité de certains biens fondamentaux à la réalisation humaine. Notre monde n'est pas seulement celui de l'affirmation d'un empire de la finance. Il existe des zones dissidentes. Des normes craquent. On assiste ici et là à de nouvelles contestations des logiques financières : le mouvement mondialisé des Indignés porte au grand jour des revendications en faveur de la gratuité, de la mutualité, de l'égalité. Quand les subalternes prennent la parole, des partages de genre, de race, de classe vacillent. L'enjeu serait de faire une carte du contemporain. Comprendre où nous en sommes dans la pensée aujourd'hui pour mieux revenir sur les vies ordinaires et en explorer les logiques de servitude et de création. L'enjeu serait de plaider, au cœur de notre métropole, pour une cité des idées. Les livres circulent du théâtre vers l'université en passant par la librairie. Cette circulation est la nôtre. Les quatre conférences-débats de cette année réuniront une politiste américaine féministe, un sociologue français, un philosophe italien et une historienne française. Avec Joan Tronto en novembre, Luc Boltanski en janvier, Antonio Negri en mars et Arlette Farge en avril, ce seront quatre regards sur notre aujourd'hui, quatre perspectives du temps présent, quatre façons de répondre au vers d'Aragon, « Est-ce ainsi que les hommes vivent ? ». Il s'agit de voir où vont les idées, comment elles s'inventent dans la vie des gens, comment elles résistent.
Guillaume Le Blanc, philosophe, écrivain, professeur de philosophie à l'Université Michel-de-Montaigne - Bordeaux III.
ATTENTION, l'accès est gratuit mais l'inscription est obligatoire.
Les quatre rencontres se dérouleront au TnBA, salle Jean Vauthier, à 19h, aux dates précisées ci-dessous.
Renseignements et réservations :
05 56 33 36 80
billetterie@tnba.org
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Joan Tronto est professeur de sciences politiques à l'Université du Minnesota (États-Unis). Elle est l'une des inspiratrices aux États Unis des théories du « care » (prendre soin). Sont disponibles en français Un monde vulnérable. Pour une politique du care (La Découverte, 2009) et Société du risque ou société du care ? (PUF, 012). « N'en déplaise aux idéologies du néolibéralisme et de la responsabilité individuelle, personne n'est aujourd'hui en position de s'autosuffire. Dans cette dépendance vis-à-vis des autres se crée une responsabilité. » |
Luc Boltanski est directeur d'études à l'EHESS et l'un des sociologues les plus importants actuellement. Ses recherches principales portent sur le nouvel esprit du capitalisme et les formes actuelles de la domination, sur l'État et les institutions, sur la possibilité de la critique. Il a notamment publié Le nouvel esprit du capitalisme (Gallimard, 1990), La condition foetale. Une sociologie de l'engendrement et de l'avortement (Gallimard, 2004), De la critique (Gallimard, 2009). « La critique consistera à montrer en quoi l'ordre social existant ne permet pas aux membres, ou à certains d'entre eux, de réaliser pleinement les potentialités constitutives de leur humanité ». |
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Antonio Negri est philosophe. Figure des mouvements de contestation d'extrême gauche dans les années 1970 en Italie, il a été contraint à l'exil en France. Il a publié de nombreux essais politiques dont Empire co-écrit avec Michael Hardt (2000) Multitude (2006) et Commonwealth (2009). « Si la démocratie moderne a été l'invention de la liberté, la démocratie radicale, aujourd'hui, veut être l'invention du commun ». |
Arlette Farge est historienne, directrice de recherche au CNRS et enseigne à l'École des hautes études en sciences sociales. Travaillant notamment sur les archives de police du 18e siècle, elle a, dans le sillage de Foucault, donné voix aux vies anonymes et reconstitué une histoire du peuple. Elle a écrit avec Michel Foucault Le désordre des familles. Lettres de cachet des archives de la Bastille (Gallimard, 1982)… « La parole est événement et personne dans les élites ne veut ni le savoir, ni l'entendre, ni surtout le croire ». |