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Débats publics (2015-2016) : « L'homme n'a point de port »

Publié le 07/03/2016
Dans la continuité du cycle initié il y a trois ans, trois conférences sur sur la pensée contemporaine et une Nuit des Idées sont organisées par l'Université Michel de Montaigne Bordeaux 3, le TnBA et la librairie Mollat.
Pouvons-nous trouver un havre en forme de silence ? Une échappée belle dans une clairière ? Alors nous pourrions nous empresser de déplier des chaises longues et nous laisserions s'envoler les cerfs-volants au-dessus des arbres à moins que nous nous décidions à courir derrière eux, à quelque distance. Mais il ne faut pas s'y tromper, la nuit nous précède toujours, ce n'est pas un songe mais plutôt une épaisse noirceur, comme une connivence avec les abîmes. Si nous sommes au bord des précipices, nous parvenons encore à les dompter, mais pour combien de temps ? « L'homme n'a point de port » écrivit Lamartine. Il passe comme le temps qui s'écoule à la manière d'une rivière aux accents inconnus. Existe - t-il des refuges dans les arrière-salles, des mondes impeccables où vivre soit une issue et non une crise, où les roses de tous les jardins pourront s'épanouir, à quelque distance de leurs pots et même des jardiniers ? L'époque proclame la crise des authenticités, le déversement des obscurités sur tous les coins de la planète. Là c'est un déchainement de fanatismes, ailleurs un déploiement illimité de marchandises, partout des misères qui augmentent et des pauvretés qui prospèrent. Les inégalités nous replongent au cœur du xix e siècle tandis que les intégrismes nous ramènent vers le Moyen Âge. Dans les eaux sombres qui ont renversé les digues, l'individu est devenu une valeur précaire, sans attache réelle, sans pouvoir apparent. Pouvons- nous redonner ses lettres de noblesse à une politique de l'individu ? Les raisons d'état, les obscurantismes fanatiques veulent le broyer mais il revient, sans port, à la surface d'une eau sans attaches. « L'homme n'a point de port », c'est pourquoi il peut partir, tenter un ailleurs, ici ou là. Dans l'errance, les bagages ne sont pas utiles. Il faudra, cette année, faire le portrait sensible et intellectuel de cet homme sans qualités d'aujourd'hui, frêle comme un roseau, mais lui restituer son pouvoir d'être, qui tantôt se réfugie derrière tous les parapets identitaires du monde, tantôt explore des communs, des chemins qui mènent ailleurs. La possibilité de la révolte, c'est la possibilité de l'individu. Mais la possibilité de l'amour, c'est l'impossibilité du renoncement. Nous pensons au TnBA que l'heure est venue d'interroger l'individu d'aujourd'hui pour mieux comprendre notre anthropologie contemporaine, à quel régime d'homme nous sommes attachés, vers quel rivage nous pouvons aller. Il n'y a pas de barques toutes prêtes ni de tenue amphibie qui nous attendent mais seulement les phares énigmatiques de silhouettes intellectuelles qui nous préviennent, aujourd'hui encore, de ce que sera demain. Écoutons - les ! Parlons-en !

Guillaume Le Blanc
Philosophe, écrivain, professeur de philosophie
Université Bordeaux Montaigne



LIENS VERS LES ÉDITIONS PRÉCÉDENTES :
> Débats Publics 2012-2013 : « Est-ce ainsi que les hommes vivent ? »
> Débats Publics 2013-2014 : « Pourquoi des penseurs en temps de crise ? »
> Débats Publics 2014-2015 : « Il faut tenter de vivre ! »


20 novembre 2015 - Roland Gori, psychanalyste à Marseille et professeur de psychologie clinique à l'Université d'Aix-Marseille. Il a contribué à émettre une critique de la pulsion d'expertise et d'évaluation inhérente à nos sociétés de contrôle dans le champ de la santé mentale mais également dans tous les registres des institutions et du travail. Il a lancé en décembre 2008 avec Stefan Chedri « L'appel des appels » qui a récolté plus de 20 000 signatures en quelques semaines et 80 000 actuellement. Cet appel est adressé aux professionnels du soin, aux enseignants, aux professionnels de la culture, de la justice... et les encourage à se rassembler et à s'opposer aux logiques d'évaluation et de normalisation dont ils sont l'objet.
4 février 2016 - Ali Benmakhlouf, professeur de philosophie à l'université de Paris12. Spécialiste de la logique et de la philosophie des sciences, il est aujourd'hui l'un des meilleurs connaisseurs de la pensée arabe. Les réflexions d'Ali Benmakhlouf se trouvent à la frontière de la pensée occidentale et de la pensée arabe. Elles contribuent ainsi au dialogue interculturel sur la valeur à accorder à l'individu et à la conception de l'individu de part et d'autre de la Méditerranée. Il entreprend de réhabiliter les grands penseurs arabes en soulignant aussi combien ils sont décisifs dans la tradition de la pensée occidentale. Il invite par là à un nouvel universalisme, également soucieux de vérité et de justice
4 mars 2016 - Diogo Sardinha, sociologue, est Président du Collège international de philosophie à Paris ; il dirige le programme de recherches « Violence et politique ». Ses domaines de travail sont la philosophie politique et sociale, l'anthropologie philosophique et les études de genre, avec un ancrage dans la tradition européenne, notamment française. Les répercussions des attentats commis à Paris (de Charlie Hebdo, Montrouge et l'Hyper Casher les 7 et 8 janvier à la nuit assassine du 13 novembre) ont été particulièrement puissantes dans l'esprit de ceux qui composent le Collège international de philosophie. De même, aucun n'est resté indifférent face aux attentats revendiqués par des groupes terroristes au Liban, au Mali, en Tunisie, en Turquie ou ailleurs, ni aux guerres qui déchirent et épuisent la Libye et la Syrie, ni à la détresse des milliers de réfugiés qui cherchent en Europe un havre de protection et de paix (…) L'intervention de l'élément religieux radicalisé et l'insistance avec laquelle il exerce ses effets aussi bien dans les esprits et les attitudes de ceux qui agissent en son nom que dans les comportements de masse de ceux qui réagissent à ses exploits, suscite de nombreuses interrogations et remarques. Iris

Roland Gori

Ali Benmakhlouf

Diogo Sardinha