Alors qu’une série d’expositions consacrées au réformateur parcourt la France depuis le début de l'année, que les articles de presse et les publications se succèdent, l’année 2017 est assurément une magnifique occasion de revenir sur l’un des figures les plus marquantes de l’histoire moderne occidentale.
Si la date du 31 octobre 1517 reste encore aujourd’hui un repère historiographique aisément convenu pour définir l’événement déclencheur de la Réforme, il n’en demeure pas moins un acte symbolique qui ne peut prendre sens qu’à la lumière d’un contexte culturel plus large. Martin Luther, né en 1483, est le contemporain d’une époque en pleine mutation, que les historiens feront coïncider avec la fin du Moyen Age et le début de la modernité. Essor de la mondialisation industrielle, découvertes des Amériques, diffusion de l’imprimerie, progrès de la recherche scientifique, autant de bouleversements qui viennent fragiliser le pouvoir religieux en place dans le Saint Empire Germanique. Par effet de contraste, la souveraine Église catholique, rigide et décadente, devient de plus en plus la cible de critiques virulentes, notamment à l’encontre de comportements abusifs en matière de mœurs et de gestion financière.
Martin Luther, moine augustin allemand et professeur de théologie, est choqué, comme d’autres avant lui, par ce fossé entre ce qu’enseignent les textes de la bible et les excès d'une Église corrompue et débauchée. C’est pour dénoncer le système des «indulgences», selon lequel tout fidèle devait rémunérer l'absolution des péchés, que Luther affichera sur la porte de l’église du château de Wittenberg les thèses qui feront date. Ces 95 propositions théologiques défient le rôle et la puissance souveraine de l’autorité pontificale sur les questions aussi cruciales que la confession, l'absolution et la rédemption.
Cette controverse, devenue rapidement populaire, sera le point de départ d’un schisme au sein de l’Église. En 1521, Luther sera excommunié, traduit en procès pour hérésie et mis au ban de l’Empire. Mais, de ce débat, de la personnalité hors norme du moine et de l'héritage de sa pensée naîtra, par une spiritualité chrétienne renouvelée, une conception inédite de la religion et de la société elle-même. Le protestantisme était né, et avec lui, une certaine idée de la modernité.