L’amour avec un grand A, romantique, signe d’une vie heureuse dans l’imaginaire collectif et depuis des siècles encensé par les œuvres de fiction, commence à poser problème.
Capitalisme, guerres, explosion du numérique et des nouvelles technologies, épidémies : l’amour au XXIe siècle n’a plus rien à voir avec ce qu’ont pu connaître nos arrières-grands-parents. Face aux problèmes sociétaux que nous devons affronter aujourd’hui, peut-on vraiment remettre en cause la vision de l’amour dans la société sans s’attaquer à la sphère privée, sans toucher à l’intime ?
À l’heure où les algorithmes décident de notre vie amoureuse, comment aimer sereinement ? Avoir des convictions sociales et politiques a-t-il changé nos façons de tomber amoureux en 2022 ? Comment le rapport à l’amour depuis la génération de nos grands-parents a-t-il pu changer autant ? Est-ce que l'hétérosexualité peut encore être le seul modèle viable ? Comment aimer quand l’amour est pour certain.e.s une excuse pour accepter les violences psychiques ou physiques ?
L’amour, qu’on le veuille ou non, est devenu un sujet politique.
Heureusement pour nous, certain.e.s ont décidé de réfléchir sur le sujet et essaient d’apporter quelques réponses.
« Le corps est le lieu d’accomplissement de l’existence sociale. » (Eva Illouz,
La fin de l’amour)
Si dans son dernier livre, la sociologue Eva Illouz analyse que les relations amoureuses sont devenues victimes du capitalisme au XXIe siècle, France Ortelli, dans
Nos coeurs sauvages, essaie de comprendre comment notre rapport à l’amour a pu changer au fil des années. Tout avait l’air plus simple pour nos grands-parents alors qu’aujourd’hui les célibataires enchaînent pour la plupart les
dates grâce à des applications qui optimisent leur chance de rencontrer un profil intéressant. Ensuite, en plus d’une modification des pratiques de rencontres amoureuses, il s’avère que le couple renverait une image un peu vieillotte tandis que le célibataire incarnerait une multitudes de possibilités, notamment en devenant un marché juteux pour les entreprises qui les prennent pour cibles : sans enfants et conjoint.e, ils auraient de ce fait un plus grand pouvoir d’achat. Être célibataire serait par ailleurs devenu branché d’un point de vue sociétal et présenté comme un style de vie sain.
Et ce n’est pas Juliet Drouar, militant queer, qui va critiquer cette idée. En effet, dans son livre coup de poing
Sortir de l’hétérosexualité, ce dernier s'attaque à cette pratique qu’il considère comme un système politique injuste envers les femmes. Remettre en question l’hétérosexualité, ce n’est pas être contre les hommes, c’est simplement remettre en question la domination. Déconstruire l’hétérosexualité serait un moyen de lutter contre le sexisme puisque pour Drouar les catégories homme-femme ne sont naturelles. Supprimer ces catégories favoriserait l’égalité.
Alors comment draguer et être en couple en 2022 ? Judith Duportail, notamment connue pour son premier livre sur l’application de rencontres Tinder (
L’amour sous algorithme), relate dans son dernier ouvrage,
Dating fatigue, la manière dont elle a expérimenté l’amour moderne. Le titre est d’ailleurs évocateur : il fait en effet référence à un nouveau concept d’épuisement mental et de mélancolie amoureuse au XXIe siècle.
Les livres suivants, mélange d’essais et de fictions, tendent à proposer une vision harmonieuse et égalitaire des relations amoureuses, ou du moins dénoncent les relations toxiques en révélant les pièges dans lesquels ne pas tomber. Sélectionnés à titre non exhaustif tellement le sujet reste vaste, ces ouvrages permettront d’offrir aux lecteurs de nombreuses pistes de réflexions sur cette question complexe, question propulsée sans ménagements de la sphère intime à la sphère publique.
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